Avec la participation de/with Lawrence Abu Hamdan, Sophia Al Maria, Mounira Al Solh, Noureddine Ezarraf, Fehras Publishing Practices, Benoît Grimalt, Wiame Haddad, Vir Andres Hera, institute for incongruous translation (Natascha Sadr Haghighian et Ashkan Sepahvand) avec Can Altay, Serena Lee, Scriptings #47 : Man schenkt keinen Hund, Ceel Mogami de Haas, Sara Ouhaddou, Temporary Art Platform (Works on Paper).
Intervention graphique/graphic intervention : Montasser Drissi
Commissariat/curators : Virginie Bobin et Victorine Grataloup

[English and German below]

La Kunsthalle Mulhouse accueille l’exposition Qalqalah قلقلة : plus d’une langue, conçue par Virginie Bobin et Victorine Grataloup.
Des œuvres qui se font l’écho de langues multiples, hybrides, acquises au hasard de migrations familiales, d’exils personnels ou de rencontres déracinées. Langues maternelles, secondaires, adoptives, migrantes, perdues, imposées, vulgaires, mineures, inventées, piratées, contaminées… Comment (se) parle-t-on en plus d’une langue, en plus d’un alphabet ? Comment écoute-t-on, depuis l’endroit et la langue dans lesquels on se trouve ? L’exposition propose ainsi, en filigrane, d’interroger le regard que nous posons sur les œuvres en fonction des imaginaires politiques et sociaux qui nous façonnent.
Qalqalah قلقلة est une plateforme éditoriale et curatoriale dédiée à la production, la traduction et la circulation de recherches artistiques, théoriques et littéraires en trois langues : français, arabe et anglais.

Une nouvelle collaboration avec la plateforme ∏Node fait l’objet d’un programme radiophonique (en construction).
Le voyage d’une recette, projet de Hui Zhang, designer culinaire associée, accompagne Qalqalah قلقلة : plus d’une langue toute la durée de l’exposition.


[Eng]
La Kunsthalle Mulhouse welcomes “Qalqalah قلقلة : plus d’une langue” an exhibition curated by Virginie Bobin and Victorine Grataloup.
The works echo multiple, hybrid languages, acquired in the course of family migrations, personal exile or uprooted encounters. Native, secondary, adoptive, migrant, lost, imposed, common, minor, invented, pirated, contaminated languages… How do we speak (to each other) in more than one language, using more than one alphabet? How we listen from within the place and language in which we find ourselves? Between the lines, the exhibition examines the perspective from which we view works, according to the political and social imaginations that shape us.
Qalqalah قلقلة  is an editorial and curatorial platform dedicated to the production, translation and circulation of artistic, theoretical and literary research in three languages: French, Arabic and English. It was founded in 2018 in France by Virginie Bobin (curator, researcher and translator) and Victorine Grataloup (curator, researcher and teacher). Today, the editorial collective of Qalqalah قلقلة consists of Line Ajan, Virginie Bobin, Montasser Drissi, Victorine Grataloup,
Vir Andres Hera and Salma Mochtari.


[De]
La Kunsthalle Mulhouse beherbergt die von Virginie Bobin und Victorine Grataloup entworfene Ausstellung „Qalqalah قلقلة : plus d’une langue“ (mehr als eine Sprache).
Die Werke werden zum Echo vielfältiger, hybrider Sprachen, die sich deren Sprecher durch Zufälle der Familienmigration, des persönlichen Exils oder der entwurzelten Begegnungen aneigneten. Muttersprachen, Zweitsprachen, Adoptivsprachen, Migrationssprachen, Volkssprachen, verlorene, aufgezwungene, zweitrangige, erfundene, gehackte, verunreinigte Sprachen… Wie spricht man (miteinander) in mehr als einer Sprache, in mehr als einem Alphabet? Wie hört man zu an dem Ort, wo man lebt, und in der Sprache, die dort gesprochen wird? Die Ausstellung bietet sich als Leitfaden an, um unsere von unseren politischen und sozialen Vorstellungen geprägte Sichtweise auf die Werke zu hinterfragen.
Qalqalah قلقلة ist eine Redaktions- und Kuratorplattform, die der Erstellung, der Übersetzung und der Verbreitung von Forschungsarbeiten in Kunst, Theorie und Literatur in drei Sprachen gewidmet ist: französisch, arabisch und englisch. Sie wurde 2018 von Virginie Bobin (Kuratorin, Forscherin und Übersetzerin) und Victorine Grataloup (Kuratorin, Forscherin und Lehrerin) gegründet. Das Redaktionskollektiv von Qalqalah
قلقلة besteht heute aus Line Ajan, Virginie Bobin, Montasser Drissi, Victorine Grataloup, Vir Andres Hera und Salma Mochtari.

 

« Le nom de Qalqalah قلقلة nous vient de deux nouvelles de la commissaire d’exposition et chercheuse égyptienne Sarah Rifky [1]. L’héroïne éponyme de ces fictions, Qalqalah, est artiste et linguiste et habite un futur proche recomposé par la crise financière et les révoltes populaires des années 2010. Ses méditations poétiques autour des langues, de la traduction et de leur pouvoir critique et imaginant ont accompagné nos réflexions, et ne nous ont plus quittées depuis. Qalqalah قلقلة est ainsi devenue une plateforme de recherche artistique en ligne, entre trois langues et deux alphabets – arabe, français et anglais. Voici qu’elle prend la forme d’une exposition.
Le titre « Qalqalah قلقلة : plus d’une langue » orchestre la rencontre entre notre héroïne et une citation de Jacques Derrida. Dans Le monolinguisme de l’autre [2], le philosophe, né en 1930 en Algérie, raconte sa relation ambigüe à la langue française, prise dans les rêts de l’histoire militaire et coloniale. Le livre s’ouvre sur une affirmation paradoxale : « Je n’ai qu’une langue, ce n’est pas la mienne », contredisant toute définition propriétaire, figée ou univoque de la langue – qu’il s’agisse de français (comme l’exprime joliment la chercheuse Myriam Suchet, lorsqu’on met un « s » à français, il faut l’entendre comme un pluriel), d’arabe (enseigné comme « langue étrangère » dans l’Algérie coloniale et aujourd’hui deuxième langue parlée sur le territoire français dans ses déclinaisons dialectales) ou d’anglais (langue globalisée et dominante dans l’art contemporain).
Ces trois langues (mais pas seulement) se retrouvent dans l’exposition, chacune porteuse d’enjeux politiques, historiques et poétiques qui s’entrecroisent et se répondent. L’exposition est ainsi traversée de signes et de voix, rappelant que les langues sont inséparables des corps qui parlent et écoutent – tout·e locuteur·trice « s’exprimant également par le regard et les traits du visage (oui, la langue a un visage) » [3], pour reprendre les mots de l’écrivain et chercheur marocain Abdelfattah Kilito. Les œuvres se font l’écho de langues multiples, hybrides, acquises au hasard de migrations familiales, d’exils personnels ou de rencontres déracinées. Langues maternelles, secondaires, adoptives, migrantes, perdues, imposées, vulgaires, mineures, inventées, piratées, contaminées… Comment (se) parle-t-on en plus d’une langue, en plus d’un alphabet ? Comment écoute-t-on, depuis l’endroit et la langue dans lesquels on se trouve ? L’exposition propose ainsi, en filigrane, d’interroger le regard que nous posons sur les œuvres en fonction des imaginaires politiques et sociaux qui nous façonnent.
La plupart des artistes invité·e·s placent d’ailleurs les modalités de publication, de circulation et de réception des œuvres au cœur de leur travail. Opérations de traduction, de translittération, de réécriture, d’archivage, de réédition, de publication, de montage, voire de moulage ou de karaoké, apparaissent comme autant de tentatives pour donner à voir et à entendre des histoires qui, parfois, se dérobent. Au-delà d’une approche linguistique, il s’agit bien d’ouvrir un espace où déployer des récits pluriels et des témoignages hétérogènes, en s’appuyant, en plus d’une langue, sur l’un des sens possibles du mot arabe قلقلة – « un mouvement du langage, une vibration phonétique, un rebond ou un écho ». [4] »          Virginie Bobin et Victorine Grataloup

En 2020, l’exposition « Qalqalah قلقلة : plus d’une langue » a été présentée au Centre Régional d’Art Contemporain Occitanie à Sète.

[1] Sarah Rifky, “Qalqalah : le sujet du langage”, traduit de l'anglais (Etats-Unis) in Qalqalah n°1, ed. KADIST et Bétonsalon - Villa Vassilieff, 2015 ; puis “Qalqalah : penser l’histoire”, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Yoann Gourmel in Qalqalah n°2, ed. KADIST et Bétonsalon - Villa Vassilieff, 2016
[2] Jacques Derrida, Le monolinguisme de l’autre, ed. Galillé, 1996
[3] Abdelfattah Kilito, Tu ne parleras pas ma langue, traduit de l'arabe (Maroc), ed. Actes Sud, 2008
[4] In Qalqalah, le sujet du langage, ibid